Cycle : Rouge Sang & Noir Corbeau
Tome 1 : L’Apprentie Faucheuse
Autrice : J. Robin
Éditeur : Le Héron d’Argent
Taille : 288 pages, ouvrage type « beau livre »
Le site officiel : ici
A l’occasion d’une interview de J. Robin pour Etherval n° 14 sur le thème de l’Héritage, les éditions Le Héron d’Argent ont accepté de me laisser découvrir en avant-première le tome 1 :
« L’Apprentie Faucheuse ».
Une lecture très agréable dans l’univers de la Mort et de ses petites mains, au plutôt de ses sept petites Faucheuses.
De quoi ça parle ?
Amélia travaille comme servante dans une maison coloniale. La jeune fille surprend sa vieille maîtresse avec son amant : un homme élégant, quatre fois moins âgé que la vieille grue. Or, le dandy, qui vient d’être couché sur le testament de la riche propriétaire, entend toucher son argent au plus vite. Amélia assiste au crime, puis se voit contrainte à fuir avec l’assassin, car une révolte d’esclaves a éclaté. Seulement, poursuivis par les insurgés, pourront-ils s’évader ensemble ou un choix va-t-il s’imposer ?
Amélia, en tout cas, se retrouve propulsée dans le monde de la Mort. Choisie par le Chevalier de l’Apocalypse : La Guerre, elle rejoint les rangs des sept petites faucheuses. Ces demoiselles sont responsables de la gestion des âmes qui stagnent sur Terre au lieu de s’élever vers d’autres cieux. Devant l’offre de l’éternité, de grands pouvoirs, de possibles promotions internes, de richesse inestimable, Amélia, la domestique maladroite, timide et incertaine, se transforme en une Faucheuse redoutable, roublarde, calculatrice et ambitieuse. De plus, Amélia est rancunière… Alors, quand on lui propose d’avoir un serviteur pour l’éternité, son choix tombe sur ce maudit Rain qui la trahit dans le passé.
Rain va donc en baver pour aider Amélia, la Red Death, à finir première au concours entre Faucheuses. Désormais, la consécration est à portée de main ! Mais si 150 ans d’effort étaient réduits à rien en quelques secondes ?
Le Style
J. Robin a un style agréable, fluide et facile d’accès. L’écriture donne envie de lire quelques lignes de plus, et encore quelques lignes de plus. Il y a quelque chose de tonique dans cette écriture, du « pep » pourrait-on dire.
Le récit se déroule à l’époque contemporaine, les personnages – même issus de temps mémoriaux – parlent avec la simplicité et le côté direct des gens de notre génération.
Un grand point fort du style est l’humour qui ponctue les chapitres. Il cède parfois la place à l’action ou aux drames, mais il n’est jamais bien loin.
J. Robin est aussi illustratrice. Le roman contient de nombreux dessins de qualité, avec une mise en page valorisante. Je n’ai eu que la version E-pub en main, mais je soupçonne que le livre papier sera somptueux.
L’intrigue
Le premier tiers du roman nous permet de mieux connaître Amélia et Rain, et de découvrir les subtilités du métier de « faucheuse » et de « Ankou », d’autant qu’Amélia veut casser la baraque en devenant la meilleure faucheuse des 150 dernières années.
Le jour des résultats dudit concours, un événement va chambouler toute la situation, et sortir l’administration de la Mort de son train-train. Le récit prend dès lors une tout autre ampleur. Aux focales de Red Death (Amélia) et de Rain s’ajoute ainsi une 3e voix, laquelle nous offre sa propre vision des faits.
Dans ce roman, bien des thèmes m’ont intéressée : l’ambition, la rancœur, la difficulté d’évoluer avec son temps, de savoir accorder le pardon et de faire confiance aux autres. J’ai aussi apprécié l’intrigue sous-jacente, qui se met en place dans le tome 1, et qui annonce une dimension supérieure au récit : celui-lui de la politique des Cieux. Amélia sera-t-elle un simple pion dans ce jeu, ou parviendra-t-elle à devenir une reine imprenable à la fin de la série ? J’ai hâte de le savoir qu’elle sera son évolution personnelle.
Les personnages
Le récit est très centré sur la relation chaotique entre Armélia et Rain. On découvre les autres faucheuses et leurs ankous/serviteurs au fur à mesure des événements. Les Cavaliers de l’Apocalypse, les anciens comme la Guerre, ou les nouveaux (ce qui rappelle avec plaisir De Bons Présages de Pratchett) ont sans doute un rôle important à jouer. Et que penser de leurs ennemis ? Et que dire de cette fascinante et gracieuse Santa Muerta, qui fera la couverture du tome 2 ?
L’univers
Les mécanismes et l’administration de la Mort sont bien trouvés. Les amateurs de la Mort de Pratchett seront heureux de trouver un univers qui lui rend une sorte d’hommage, mais qui dévoile aussi son originalité propre et ses codes intrinsèques.
Le récit se passe à la fois sur Terre et dans le domaine de la Mort, offrant bien des cadres et tableaux. Mon seul bémol concernant ce cycle porte sur le peu d’interactions historiques et culturelles entre les protagonistes et les différentes époques historiques traversées. En revanche, j’ai hâte d’en découvrir un peu plus sur cette figure mythique de la Santa Muerta, priée en Amérique du Sud.
Au total,
Les atouts de ce tome 1 « L’Apprentie Faucheuse » sont une mise en page illustrée d’une belle qualité, un style fluide et un humour réussi, des personnages particulièrement attachants (j’avoue avoir un faible pour Rain), et une intrigue qui se dévoile au fur et à mesure nous emportant dans une grande aventure palpitante.